SCOLARITÉ

À la station de métro Duroc

J’ai été d’abord scolarisé à l’école maternelle de l’Institut National des Jeunes Aveugles institution ancienne et prestigieuse qui a eu entre autres comme élève puis professeur Louis Braille, et qui est située boulevard des Invalides à Paris, à côté de la station de métro Duroc.

Façade de l'INJA (cc Photo_Mbzt)

Institut National des Jeunes Aveugles (INJA) (Photo Mbzt – cc)

École nouvelle d’Antony

École Nouvelle d'Antony

École Nouvelle d’Antony (Photo PE Weck – cc)

Pour le passage en primaire, mon père qui désirait m’intégrer au milieu des voyants le plus tôt possible, a choisi de me placer à l’École nouvelle d’Antony (92), école d’avant-garde qui était alors la seule école primaire à accepter d’inscrire un aveugle parmi ses élèves. Ça s’est bien passé sauf qu’au bout d’un certain temps on s’est aperçu que je ne progressais pas au niveau de l’écriture et de la lecture faute de personnel susceptible de m’enseigner le Braille. Mon père a alors voulu prendre en charge de me l’enseigner lui-même et ça a été une catastrophe car il n’était pas du tout pédagogue, à la fois trop sévère et dépourvu de patience.
Mon père était quelqu’un d’extraordinaire et d’immensément attentionné à mon égard, qui m’emmenait aux concerts et dans les musées, me faisant toucher des sculptures qu’on n’avait pas le droit de toucher…

…et ça s’était amplifié après son divorce d’avec ma mère, dans une totale abnégation de sa part, me construisant des cartes de géographie en relief… que je n’ai, en fait, pas utilisées, bloqué que j’étais face à sa manière de faire, le pendant de son abnégation étant une extrême sévérité.

Institut de jeunes aveugles de Saint-Mandé

Fronton de l'institut de St Mandé (cc Photo_Edhral)

Institut Départemental de Jeunes Aveugles de Saint-Mandé (Photo Edhral – cc)

Prenant conscience de mon retard, mes parents m’ont alors réorienté vers une institution spécialisée, l’Institut départemental des jeunes aveugles de Saint-Mandé (94), en internat, car cette école était trop loin de chez eux pour leur permettre de m’y amener chaque jour. Je revenais à la maison le mercredi soir (le jour de repos des écoliers était alors le jeudi !) et le samedi à midi (pour le week-end).

Et dans cet institut je me suis retrouvé être la risée de tous mes petits camarades, à cause de ma faiblesse en Braille, amplifiée par une sorte de revanche sur le fait que j’avais tenté de me singulariser et de me distinguer de notre condition commune.

J’ai eu droit à un peu tout en matière de remarques et d’avanies, mais en même temps cela m’a appris la vie, ce n’était pas inintéressant. Je n’y ai pas été bon élève : clairement j’étais un cancre, d’autant plus que la passion de la musique commençait à m’habiter et à rendre tout le reste vraiment secondaire.

Deux lycées très parisiens !

Bref j’y ai terminé ma scolarité primaire, j’ai fait une année de secondaire à l’INJA à Duroc, puis j’ai poursuivi jusqu’en troisième au lycée Buffon, et enfin au lycée Victor Duruy jusqu’à la terminale.

Lycée Buffon (cc Photo_Kajimoto)

Lycée Buffon (Photo Kajimoto – cc)

Il s’agissait de classes normales, sauf que j’avais un équipement un peu spécial : une machine à écrire en Braille pour noter mes cours, et une machine à écrire normale – une petite Hermès Baby mécanique – pour pouvoir faire mes devoirs.

J’avais suivi, pour cela, des cours de dactylographie chez IBM à Vincennes, ce qui s’est avéré être, pour le coup, une des très bonnes idées de mon père.

Le magnétophone, à l’époque, n’était pas suffisamment maniable, obligeant à des avances et retours interminables pour retrouver un sujet, et je ne l’ai pas utilisé au lycée.

Machine à écrire Blista Braille (cc Rémi Kaupp)

Machine à écrire braille (Photo Rémy Kaupp – cc)

Machine à écrire portable Hermes Baby (cc Dr Nachtigaller)

Machine à écrire Hermès baby (Photo Dr Nachtingaller – cc)

Je me suis fait de très bons amis au lycée, dont certains que je vois toujours. Pour Thierry Guillemin, qui vit maintenant au Grand Bornand, notre rencontre date de Buffon, il était passionné de musique ce qui était évidemment un lien important. Il voulait jouer de la batterie à l’époque, puis s’est plutôt intéressé au son, il a mixé un des albums que j’ai faits avec Lama Gyurmé, s’occupe de tous nos concerts, a mixé divers autres artistes, et travaille de manière alimentaire à France 3. C’est certainement mon plus ancien ami et le plus proche. Un autre ancien ami, datant de Victor Duruy, Frédéric Piton, est devenu psychiatre. On séchait les cours pour venir jouer du piano chez moi ! C’est un excellent pianiste classique qui joue Ravel et Debussy bien mieux que je ne pourrai jamais le faire. Également amoureux des synthés, on se complétait bien. Et je ne veux pas oublier dans cette énumération François Chatelet, qui a longtemps vécu à la Réunion est est désormais revenu en France, avec qui nous jouions du piano et allions souvent au concert.

Thierry Guillemin au Grand Bornand, août 2017 (cc G.Athanase)

Thierry Guillemin au Grand Bornand, en août 2017 (Photo G.Athanase – cc)

Le bac !

C’est ainsi que j’ai fini par passer mon bac littéraire, ce qui a mis un terme à mon parcours scolaire classique (ou pas si classique que ça, en un sens !). Les dés étaient jetés, j’avais fait ma séance d’enregistrement en studio pour Brigitte Fontaine juste avant l’examen et ma carrière serait donc clairement de musicien.

H

Enfance

I

La musique et moi